Le Devoir Bernard Lamarche

Danielle Richard mulit-forme

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C’est à une invitation irrésistible qu’a eu à répondre Danielle Richard, de la part des maisons montréalaises de la culture. La chanteuse et screameuse de la formation métal hardcore La Cage de bruits pourra faire étalage de la polyvalence de ses talents vocaux à partir de ce soir. Elle s’apprête à faire une mini-tournée de trois maisons de la culture, pour un spectacle qui mêlera ses divers intérêts.Entre le chant bulgare, le jazz et le hardcore, Danielle Richard fera montre de ses multiples talents, dans la série «Voix de femmes». Une preuve que l’underground n’a rien d’unidimensionnel.

Depuis la sortie de l’album Exutoire, il y a un an, La Cage de bruits a fait parler d’elle. Au point de devenir lauréate bien méritoire du groupe punk-hardcore de l’année aux derniers MIMI’s, le gala de l’underground. Le quatuor se porte bien même s’il s’est transformé en trio (le bassiste a quitté la formation) et la réponse positive de la critique et des fans au premier album permet de croire qu’un second disque ne saurait tarder. Entre-temps, Danielle Richard, celle qui s’échine les cordes vocales pour gueuler haut et fort la défonce de la formation, prête sa voix à d’autres amours. «C’est Liette Gauthier, de la Maison de la culture Ahuntsic-Cartierville, qui m’a invitée», raconte la jeune femme.

Les deux femmes se connaissent depuis une dizaine d’années, à l’époque où Richard fondait l’ensemble vocal Tangra, consacré au chant traditionnel bulgare. «Ce groupe était une première tentative de former un band pour créer La Cage de bruits.» Avec trois Bulgares à bord (dont l’acteur Peter Batakliev), le groupe était également formé de Patrick Dostie, actuel guitariste de La Cage de bruits, un vieux compagnon de route de la chanteuse. La chanteuse principale de la formation était alors Stefka Iordanova, qui a travaillé avec Carbone 14, le groupe français Deep Forest (on l’entend sur leur dernier opus, Detected Music) et qu’on entend notamment sur les Jongleries élastiques (1995) de Miriodor, une des plus vieilles formations de musique actuelle au Québec (dont le noyau dur est formé de Rémi Leclerc, Bernard Falaise et Pascal Globensky). De Iordanova, Richard explique que «c’est elle qui [lui] a montré la technique de voix bulgare».

Richard pourra donc faire un retour aux sources pour les trois concerts. «J’étais étudiante de Karen Young à l’université. En travaillant comme choriste avec Karen, j’ai fait des shows multiethniques. Elle mélange tous les styles et se fout des étiquettes qu’on peut lui donner. Je suis un peu comme elle.» La carte blanche qu’on lui accorde lui permet, presque dix ans plus tard, de monter le même genre de concert. «J’ai pu rencontrer une foule de musiciens du monde entier, dit-elle, dont Gustavo Cabili», guitariste et compositeur argentin qu’on retrouve sur scène avec elle.

Le spectacle promet un survol panoramique du métissage culturel à travers lequel Richard est passée. Une vingtaine de chansons ont été choisies dans un répertoire qui chevauche la Bulgarie, l’Inde, le Québec et l’Argentine, sur des thèmes proches de ceux de La Cage de bruits: la féminité, la terre, l’écologie. L’exploration se fera à travers le blues, le gospel, le jazz et d’autres compositions inédites, aux ambiances multiethniques et contemporaines, promet la chanteuse, qui se promène avec son ventre bien rond de six mois de grossesse. «J’ai aussi chanté dans un band de gospel. On a fait la tournée des cafés chrétiens et joué dans les églises. J’ai même chanté à l’oratoire pour une conférence sur la paix.» Avec son guitariste, elle a aussi tâté du jazz, pendant sept ans, avant de fonder La Cage de bruits.

La Cage de bruits au grand complet sera sur scène avec la chanteuse. Ainsi, à la batterie, on retrouvera Isabelle Allard, une batteuse franchement dégourdie qui martèle les tambours pour La Cage… Y aura-t-il des passages heavy dans le concert? «Non. Les maisons de la culture voulaient quelque chose de plus doux. Et je trouvais ça intéressant de montrer un autre côté de nous. Les gens peuvent penser qu’on est des gros métals qui prennent des grosses brosses et qui fument du pot. On s’est calmé pour ce show-là», poursuit Richard, en rigolant.

La formation Les Zalarmes, issue d’Hochelaga-Maisonneuve, sera également de la partie. Il faut dire que Richard a fait sa part dans le monde de l’enseignement, notamment durant neuf ans au Cégep Saint-Laurent (dont une année à temps plein, en chant jazz). Les Zalarmes proviennent de La Chanterie, une école de chant où elle travaille. D’ailleurs, deux des élèves de Richard vont l’accompagner, Annie Saumure et Nadine Goulet. «C’est bien de voir ses efforts fleurir, de voir que ce que j’enseigne porte ses fruits. Je ne me sens pas toute seule.»

Le prochain album de La Cage de bruits, annonce Richard, devrait être plus exploratoire, en «conservant son côté rough. Je suis en train de montrer à Isabelle comment jouer des tablas indiens. On va aller puiser de ce côté-là. Cette nouvelle approche va amener une nouvelle dynamique. Je suis contente qu’on se fasse reconnaître dans le milieu punk-hardcore, mais je ne considère pas appartenir à cette catégorie-là comme telle. Mais ce côté agressif reste toujours moi». À voir, avant que ne soit entamé un nouveau chapitre. Entrée libre.

Bernard Lamarche, Journal Le Devoir 2002/10/09

Le 9 novembre 2002 à la Maison de la culture Plateau Mont-Royal

Le 16 novembre 2002 à la Maison de la culture Ahuntsic/Cartierville

Le 30 novembre 2022 à la Maison de la culture Rosemont Petite-Patrie